L'analyse du LCR dans la méningite

Le diable se cache dans les détails

Le liquide céphalo-rachidien (L.C.R.) est un fluide clair, transparent, qui circule dans les ventricules cérébraux, l’espace sous-arachnoïdien et autour de la moelle épinière. Il joue un rôle essentiel dans la protection du cerveau, la régulation de la pression intracrânienne, l’élimination des déchets métaboliques du système nerveux central, et la distribution de certains nutriments. Le L.C.R. est continuellement produit par les plexus choroïdes dans les ventricules latéraux du cerveau, et il est réabsorbé dans la circulation veineuse via les villosités arachnoïdiennes.
Celui-ci sera recueilli lors d’une ponction lombaire (Il existe un syndrome appelé « Post P.L.»).

• L’eau et Electrolytes : Le L.C.R. est constitué à environ 99 % d'eau, ce qui le rend peu dense comparé au plasma sanguin. Il contient du Sodium (Na⁺), du Chlore (Cl⁻), du Potassium (K⁺), du Calcium (Ca²⁺) et du Magnésium (Mg²⁺) mais à des concentrations souvent plus faibles que dans le plasma
• Glucose : La concentration de glucose dans le L.C.R. est généralement faible (60-70 % de la concentration dans le plasma), soit environ 0,4-0,7 g/L, car il est consommé par le métabolisme cérébral. Le glucose est essentiel pour fournir de l’énergie aux cellules nerveuses.
• Protéines : Le L.C.R. contient une petite quantité de protéines (0,1-0,4 g/L), principalement des protéines à faible poids moléculaire comme l'albumine, qui traversent la barrière hémato-encéphalique. Un faible niveau de protéines est normal, et une élévation peut indiquer une pathologie.
• Cellules : Le L.C.R. physiologique contient très peu de cellules, généralement moins de 5 cellules par microlitre, principalement des lymphocytes et des macrophages. Les cellules sont rares car la barrière hémato-encéphalique limite leur passage.
• Lactates : Les lactates sont un biomarqueur de l’hypoxie tissulaire. Normalement, la concentration de lactates dans le L.C.R. est faible, généralement autour de 1 à 2 mmol/L. Une élévation du lactate peut suggérer une hypoxie ou un métabolisme anaérobie du tissu cérébral.

Modifications physiopathologiques du L.C.R.

En cas d'infection (Il existe deux tests cliniques évocateurs de méningite), d'inflammation ou d'autres pathologies, la composition du L.C.R. peut changer de manière significative. Voici les principales anomalies observées dans les étiologies pathologiques du L.C.R. :

• Cellules :
  • Pleocytose : Une augmentation du nombre de cellules dans le L.C.R., généralement des globules blancs (leucocytes), est un signe d'inflammation. Le type de cellules dominantes (lymphocytes, polynucléaires neutrophiles, etc.) permet de différencier les causes.
  • Méningites virales : Présence de lymphocytes.
  • Méningites bactériennes : Présence de polynucléaires neutrophiles.
  • Méningites fongiques ou tuberculeuses : Présence de lymphocytes et parfois de macrophages.
• Protéines :
  • Une augmentation des protéines dans le L.C.R. (hyperprotéinorachie) peut être observée dans les infections (bactériennes, virales ou fongiques), les inflammations, les traumatismes, les tumeurs, ou les pathologies neurodégénératives.
  • Méningites bactériennes : Augmentation significative des protéines, souvent >1 g/L.
  • Syndrome de Guillain-Barré : Augmentation de la concentration des protéines sans pleocytose (syndrome albuminocytologique).
• Glucose :
  • Une diminution du glucose dans le L.C.R. est un signe d’infection bactérienne, fongique ou de certaines infections virales, car les agents pathogènes consomment le glucose. La concentration peut être inférieure à 0.4 g/L dans les infections bactériennes.
  • Méningites bactériennes : Glucose < 0,4 g/L.
  • Méningites virales : Glucose normal ou légèrement abaissé.
  • Méningites fongiques et tuberculose : Glucose bas également, mais en général moins marqué que dans les infections bactériennes.
• Lactate :
  • Une augmentation du lactate dans le L.C.R. est un signe d'hypoxie tissulaire, d'infection ou de métabolisme anaérobie.
  • Méningites bactériennes : Augmentation du lactate (> 2,5 mmol/L).
  • Hypoxie cérébrale : Lactate élevé.
• Chimie ionique :
  • Élévation du taux de potassium : Peut être observée dans des conditions comme l’hémorragie sous-arachnoïdienne ou après un traumatisme crânien.
  • Déséquilibres dans les électrolytes (comme sodium, potassium et chlore) peuvent survenir en raison de l’inflammation ou de l’augmentation de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique.
• Bilirubine :
  • En cas d’hémorragie sous-arachnoïdienne ou d'hémolyse, la bilirubine peut être détectée dans le L.C.R., ce qui entraîne une couleur jaune de celui-ci (xanthochromie).
• Bactéries ou autres pathogènes :
  • La présence de bactéries (lors d’une méningite bactérienne) ou de champignons (dans une méningite fongique) dans le L.C.R. est un signe pathognomonique d'infection.
  • Virus (par exemple, l'herpès simplex ou l'entérovirus) peuvent être identifiés par P.C.R. dans le L.C.R. en cas de méningite virale.

Conclusion

Le L.C.R. physiologique est un fluide clair contenant principalement de l’eau, des électrolytes, du glucose, des protéines et quelques cellules. En cas de pathologie, la composition du L.C.R. peut être modifiée, ce qui permet de poser un diagnostic plus précis. Des anomalies telles qu'une augmentation des cellules, des protéines, une diminution du glucose, une élévation du lactate ou la présence de pathogènes permettent de suspecter des pathologies spécifiques telles que des méningites bactériennes, virales, fongiques ou d'autres troubles neurologiques.
Cela sera ensuite confirmé secondairement lors du résultat des cultures du L.C.R. indiquant le germe pathogène en cause.  
La ponction lombaire doit être réalisée simultanément à un bilan sanguin, afin de déterminer le taux plasmatique de glucose ainsi que les niveaux de la protéine C-réactive (C.R.P.) ou de la procalcitonine (P.C.T.) (La procalcitonine (P.C.T.) est un marqueur annonciateur du sepsis).

Ces modifications, détectables lors de la ponction lombaire, revêtent une importance cruciale pour la gestion du patient. 
En cas de méningite, en particulier bactérienne, chaque heure sans traitement adéquat compromet le pronostic, rendant ainsi impératif le début rapide du traitement. Sur la base des observations faites sur le LCR, il est possible de commencer précocement un traitement probabiliste approprié : antibiothérapie en cas d'infection bactérienne, antiviral en cas d'infection virale, ou antifongique en cas d'infection mycotique.